Turin 2002
Traduction : C. Charrier
(Extraits de la conclusion)
Lunique tche dun homme qui pense et aime la
vrit consistait en face de la premire explosion du soulvement des
ouvriers de Silsie non pas penser en matre dՎcole mais plutt tudier le caractre qui lui est
propre. Pour cela il faut avant tout
une certaine perspicacit scientifique et un certain amour des hommes, tandis
que pour lautre opration une phrasologie toute prte, immerge dans un creux
gosme, suffit amplement.
LՎmeute industrielle si partielle soitelle, renferme en ellemme une me universelle.
() une rvolution sociale se place au point de vue
de la totalit, parce quelle part
du point de vue de chaque individu rel, parce que ltre collectif dont lindividu sefforce de ne plus tre isol est
le vritable tre collectif de
lhomme, lՐtre humain.
Marx, Gloses marginales critiques larticle le Roi de Prusse et la rforme sociale, Spartacus,
1970, trad.. J. Camatte, pp. 85 et 8889[1].
La lutte des nettoyeurs de trains pose plus de
questions quelle napporte de rponses qui se place, dans le processus
dorganisation de classe, du point de vue de la transformation des relations
sociales actuelles.
Les rflexions qui suivent se sont construites la
suite des initiatives de fin avril et ont t intgres et modifies au jour
le jour au cours de discussions entre
camarades intresss par cette exprience.
Ltalement
dans le temps du conflit (de
lautomne pass au mois davril de cette anne), son intensit en trois moments distincts particulirement
significatifs (mi-dcembre 2001, fvrier et avril de cette anne), son caractre
simultanment local et national, la fraction
de la classe concerne, ses contenus
et les formes de lutte imposent une
analyse et une rflexion sur lՎtat actuel du conflit de classes, tout autant
que les questions qui restent en suspens et les problmes encore ouverts.
() les actions autonomes nont t que rarement
considres comme les premiers symptmes dun nouveau mouvement dont lorganisation
ne pouvait apparatre et se dvelopper que dans la lutte elle-mme.
Pratiquement, les tentatives danalyses essaient dexpliquer lՎchec de ces
actions, soit par leur manque dorganisation, soit par linexistence dun
parti rvolutionnaire, le manque de conscience, le retard idologique, etc.
Toutes ces critiques relvent en fait des schmas anciens ou traditionnels ().
[2]
notre avis, lautoclarification du mouvement rel et
de ses limites est un moment essentiel du dveloppement de lautonomie
proltarienne, entendue galement comme capacit autonome de construction[3]..
Lautoclarification, par consquent, est un effort de
comprhension de la dynamique dune lutte dans ses limites et dans ses
perspectives, destin saisir les motifs dintrt qui sortent du cadre du
conflit particulier, un effort qui ne sՎteint pas avec la fin de la lutte,
dans la mesure o son but est de linsrer dans un processus gographiquement
et temporellement plus ample, en en saisissant les consquences imprvisibles dans
limmdiat.
Il nest pas possible destimer sur le fond lampleur
de lՎcho, pour le mouvement gnral de la classe, dun vnement
particulier : sa relle rception et son enregistrement sont des choses
que lon ne peut connatre que quand le fleuve karstique de la lutte de
classes, dans son parcours accident et invisible, revient la surface et
montre ce quil a retenu et fait sien.
Quand une lutte, accumulant toute une srie de
contradictions non rsolues et de questions sans rponses, tend vers un point
de rupture et a dj prouv la force qui nat de lunion des travailleurs,
elle a devant elle diffrentes perspectives. Elle peut tre rcupre par les
secteurs les plus dynamiques du systme de reproduction des rapports sociaux
actuels, ou rprimes, ou bien elle peut sՎtendre aux autres secteurs de
classe avec lesquels elle a su tisser des relations et fournir, peutАtre mme
indirectement, une riposte a une condition commune. Naturellement ces perspectives ne sexcluent pas
mutuellement, et les diffrentes combinaisons des deux premires dans laction
du parti de lordre, ninterdit pas le dveloppement de la troisime, qui, au
contraire prend souvent forme en relation avec le comportement de la classe
dominante et en raction celuici.[4]
Revenons
la lutte des nettoyeurs de trains, en voyant rapidement lorganisation du
travail et la composition sociale des travailleurs.
Les tches, la taille de lՎquipe et sa composition
contractuelle et sociale, le type de roulement, etc., changent selon le type de
train et sur la base du travail effectuer.
Les quipes sont formes sur les plateformes par les
chefs de garages en fonction du personnel disponible et des exigences du
travail de la journe.
Le travail est cycle continu : sept jours sur sept,
365 jours par an.
40% des trains qui arrivent dans les garages ou dans
les gares repartent immdiatement, le nettoyage doit donc tre fait just in
time, tandis que les 60% restants
repartent dans la journe.
Trois type de travaux sont faits dans les trains.
Le premier, appel volante et qui requiert peu prs troisquart dheures par
train est effectu sur les trains de banlieues qui convergent sur Milan de
toute la Lombardie, par des quipes de 10 personnes en moyenne ().
Sur quelques trains, selon le cas, et en gnral sur
les trains longue distance (appels trains du cholra ), est effectu le
second type de travail dit particulier , qui ncessite environ 4 heures et
est pay aux entreprises adjudicataires selon le temps pass ; par exemple,
les housses des appuisttes les plus sales ou les siges en mauvais tat sont
remplacs.
Le troisime type de travail, qui est priodiquement
effectu sur tous les trains, et appel radical : les wagons sont
sortis des rails, leur partie infrieure est nettoye ; lintrieur on
applique un traitement ad hoc, et
lextrieur on efface les graffitis et autres inscriptions.
Pour le nettoyage radical sont employs seulement
les anciens, les mieux pays, qui travaillent 5 jours par semaine.
Pour les nettoyages particuliers et pour toutes
les tches en gnral plus complexes des traitements ad hoc, sont employs des travailleurs fixes [5]
qui travaillent par roulement de 8 heures (7 heures et 37 minutes effectives).
Environ 40% sont des immigrs.
Pour le nettoyage volante , sont employs quasi exclusivement des travailleurs
immigrs, embauchs linitiative des chefs de garage sur un contrat prcaire,
qui travaillent par roulement de 6 heures (6 heures effectives !).
La segmentation interne
donne par les diffrents profils contractuels, qui correspondent essentiellement
aux origines diffrentes des travailleurs, nont t dpasses que
partiellement durant la lutte ; les travailleurs jouissant de la plus
grande anciennet, rejetant les conditions de rembauche revues la baisse
ont fait la locomotive et les travailleurs les plus jeunes et prcaires,
la remorque .
On peut cependant diviser les travailleurs en deux
groupes.
Le premier est celui des travailleurs italiens, pour
la majorit des immigrs historiques du Sud, avec un contrat fixe , de
meilleures conditions de rtribution et une grande anciennet (1020 annes de
service), dont certains doivent leur propre ascension et celle de membres de
leur famille, leurs liens avec les syndicats.
Beaucoup sont
danciens ouvriers dusine mis la porte durant le cycle de restructuration
cheval entre la seconde moiti des annes soixante-dix et la premire moiti
des annes quatre-vingt. Ils ont en gnral un bas niveau de scolarisation et
la plupart du temps les plus gs parlent exclusivement le dialecte de leur
rgion dorigine ; ils ont une faible qualification professionnelle, de la
difficult pour trouver un autre emploi, et souvent ils ont un autre travail.
Mme parmi les travailleurs italiens il y a une part
de prcaires, qui depuis toujours ont un contrat dure dtermine ( a fait
trente ans que je subis lattaque de larticle 18[6]
, a observ amrement un travailleur interview).
La majorit a famille
et enfants, et elle est consciente du fait que les nouvelles conditions de
travail auraient entran une drastique diminution de salaire (les salaires
nominaux sont inchangs depuis dix ans, et tournent entre 900 et 1000 euros).
Les dlgus et les travailleurs les plus actifs ont
tous une exprience syndicale et politique acquise au cours de leurs prcdents
emplois :
Ils en ont retir une pratique syndicale et une
conception combative de lorganisation, critique par rapport lactuelle
politique syndicale quils jugent indigne du vrai syndicalisme.
Ils sont sans cesse en conflit avec les permanents,
qui se dbarrassent de leur travail comme sil sagissait dun travail
quelconque avec le mme esprit quun banquier ou un charcutier quand ils font
le leur, et ils regrettent que les
permanents de la FILT[7]
soient presque tous des cheminots, alors que peu dentre eux viennent du
support ferroviaire.
Ils ont un sens aigu du rle de dlgu, tenir,
selon eux, avec orgueil et responsabilit sans jouer les prima
donna (mme quand ils sont sous lattique de la gare !).
Ils sont sincrement choqus que quelques
dlgus prennent une charge reprsentative seulement pour bnficier des
heures de dlgation syndicale, et
ils pensent que dans une situation aussi clate, o ce nest pas comme lusine avec les ateliers, mais 1000 personnes sur 1215 bases distantes de
67 kilomtres ou plus, les
dlgus devraient faire leur devoir et non se la couler douce.
Ils ne supportent pas que les travailleurs prennent
la carte du syndicat, comme ils sabonnent au stade, convaincus dՐtre dans une catgorie qui donne
envie de vomir et qui na releve
la tte que pour peu de temps.
Tous jettent de la merde sur le gouvernement de
centredroite et sur larrogance des patrons, peu, seulement les syndicalistes
de base, se souviennent des mfaits du centregauche.
Le second groupe de travailleurs est en majorit
compos dimmigrs : mme si quelques uns dentre eux font un travail plus
complexe et absorbant, et si quelques autres sont devenus chefs dՎquipe,
limmense majorit travaille avec des contrats dure dtermine, beaucoup
temps partiel, et est trimbale
entre les divers garages, quais et plateformes, pour suppler aux milles
ventualits imposes par un turn over lev.
Ils sont souvent dimmigration rcente et ne parlent
quasiment pas italien, mme sils ont un niveau de scolarit plus lev que
leurs collgues italiens ; ils gardent pour eux le strict minimum de leur
salaire et envoient le reste leur famille, en Asie du Sud (Inde, Pakistan,
Bangladesh, SriLanka), en Amrique latine et en Afrique du Nord.
Sils adhrent un syndicat, ils le font
exclusivement pour les services que celuici garantit. Aucun dentre eux
na dexprience politique antrieure dans son pays dorigine dans des
formations communistes ou une exprience de conflit avec les autorits
politicojudiciaires.
Ces travailleurs ont frquent les assembles
gnrales, ils ont particip la grve et ont t parmi les derniers, le 25
avril, quitter la gare centrale, mais ils nont pas trouv chez les autres
travailleurs la disponibilit ncessaire pour les consulter et les informer
rgulirement de ce qui se passait ; ils nont pas t perus comme des
camarades de travail.[8]
Cette masse critique de travailleurs immigrs
prcaires tend tre la moins sensible la logique du chantage au
licenciement, dans la mesure o elle a toujours d prendre en compte cette
instabilit dans sa propre situation de travail.[9]
Elle a suivi la lutte moyennant un
rapport de confiance avec quelques travailleurs lintrieur de lՎquipe ou du
garage, mais elle na pas exprims ses propres besoins : la force
explosive des contradictions quelle vie sur son poste de travail et dans la
socit.
Les travailleurs fixes de leur ct, on fait de la
ncessit de donner la parole ces travailleurs une question subsidiaire, les
relguant un rle secondaire, sinon marginal ; ainsi ils nont pas pris
en charge, dans une logique de soutien mutuel, leurs exigences et ils nont pas
su allier leurs propres objectifs avec ceux des travailleurs disposant de
garanties moindres, socialement moins protgs[10].
Quoi quil en soit, sans nous laisser aller des
hypothses sur ce qui aurait pu arriver, nous pouvons affirmer que la composante des travailleurs prcaires,
immigrs pour la plupart, aura en Italie, dans les services en gnral mais pas
seulement, un rle toujours plus dterminant. Il faut en saisir ds prsent
le potentiel offensif pour la lutte de classes, en stimulant lorganique
participation et la tendance entraner le conflit vers une mancipation
sociale plus globale.
Dans les interviews et dans les discussions, des
attitudes racistes se sont montres de la part de quelques travailleurs parmi
les plus anciens, qui attribuent aux immigrs la dgradation de leur propre
condition et acceptent tacitement que leur charge de travail soit augmente.
Lexistence de ces attitudes est prise en compte par les travailleurs immigrs
comme une partie intgrante de leur condition ; les camarades intervenus directement dans le conflit
ont cherch en consquence, pardessus tout, faire en sorte que les
travailleurs se socialisent entre
eux[11].
Lorsque la situation contractuelle vacille, la
prcarit sՎtend ce que lon appelle les travailleurs garantis, faisant du
coup sՎvanouir la diffrence entre fixes et prcaires . Cest cette
condition de commune incertitude que lon peut utiliser comme bras de levier
pour affirmer la tendance la transformation de la condition proltarienne.
La force de la classe devient une force effectivement
propulsive dans la mesure o, dans la lutte mme, sont dpasses ses luttes
internes.
Les formes dorganisation du travail qui modlent
laction collective, dans ce cas le travail en quipe et dans diffrents
garages, sont ladhsif initial, tandis que leffort pour impliquer de manire
positive tous les travailleurs des diffrents secteurs de lentreprise, ici les
autres travailleurs de lentreprise de service et les autres travailleurs des
chemins de fer, est un moment ultrieur du dveloppement de la force de la
classe. Le premier moment nest pas compltement accompli, le second, pour
autant que nous le sachions, a t seulement partiellement ouvert.
Entrer immdiatement en contact, au lieu dattendre
dans les garages ou sur les plateformes, une oreille colle la radio et un
il sur la tlvision, comme le font les autres travailleurs, aurait jet les
bases pour une relle construction organique [collegamento] de la lutte, comme cela cest pass par contre en
partie plus tard.
La Coordination nationale a cherch, non sans
difficults, suppler ce dficit initial, sachant que, mme la volont la plus
gnreuses des travailleurs les plus actifs, ne peut remplacer les exigences
relles qui jaillissent des luttes.
La tentative de se coordonner avant lՎchance du 6
mai [date de fin des contrats prcaires, NdT] a t un travail de jonction danneaux diffrents et
un travail minutieux de tissage pour paraphraser un de ses organisateurs
qui a impliqu les travailleurs les plus actifs, peutАtre RSU[12],
adhrents aux syndicats, fortement reprsentatifs sur les lieux de travail,
mais isol et peu pris en considration, dj auparavant, par la bureaucratie
syndicale, qui sest lev le cul seulement
quand le couvercle de la marmite saut.
Les appartenance syndicales diffrentes des
travailleurs, avec les degrs relatifs dimplication, et les fortes pousses
locales pour se concentrer sur soi, mme aprs que les relations aient t en
partie tablies, donnent le cadre gnral dans lequel se sont droules les
choses. Dans une telle situation, laction peut tre dautant plus efficace et
incontrlable que lautonomie des initiatives locales et le caractre
horizontal de la communication sont importants, que la coordination est souple
et interchangeable ; a contrario
laction sera dautant plus inefficace quelle sera dlgue a un organisme
central, non contrlable par les travailleurs, simple grant dun flux
dinformations et de dcisions provenant du centre.
Un aspect important est la solidarit dmontre
divers titres par les autres travailleurs.
A Milan, les travailleurs des ateliers de rparation
ferroviaire de Greco, outre le fait de fournir le matriel pour les banderoles Les
licenciements ne passeront pas et Non
aux licenciements, accroches sur les
murs extrieurs de la gare centrale, se sont dclars disponibles pour la
grves des travailleurs du nettoyage en avril.
Quelques camarades syndicalistes de base ont
contribus la formation dune coordination nationale.
Un travailleurs embauch par lentreprise Gorla
loccasion de ladjudication du nettoyage des btiments communaux et des
coles, a cherch a mettre en contact le conflit dj entam par lui et ses
camarades de travail contre laccord de merde sign par les syndicats avec
celui des travailleurs du nettoyage des trains et des gares ; il est
intervenu une assemble des nettoyeurs de trains la Chambre du Travail, le
10 avril, dnonant la duplicit de lattitude des syndicats qui, entre autre,
navaient pas mis en rapport les travailleurs de lentreprise en question qui
travaillaient sur des chantiers diffrents ; il est aussi intervenu le 25
avril, avec ses camarades de travail, pour exprimer sa solidarit avec la
lutte.
Ce qui a effectivement manqu
cest la solidarit active des travailleurs du secteur ferroviaire, eux aussi
touchs par la restructuration des chemins de fer, qui payent encore leur
hritage corporatiste et une incapacit daction commune avec tous les autres
travailleurs du secteur.
II
Les syndicats parlent toujours dunit, les groupes
de front, de comits, etc. ; dans toute grve o sexprime lautonomie de
laction, personne ne parle plus de cela, car la lutte est le fait de tous les
travailleurs en marche.
H. Simon, Nouveau mouvement, 1974, p. 8[13]
()
Milan, le 5 dcembre, il a
suffit dun simple bouche oreille pour organiser loccupation des quais. En
fvrier il a suffit dune assemble de quelques minutes la gare centrale,
dans laquelle seuls les syndicalistes sinterrogeaient sur ce quil fallait
faire et voulaient discuter dmocratiquement sur comment continuer, alors que
tout le monde savait, depuis une semaine de mobilisation, ce quil fallait
faire et lavait dj fait.
Bien que la lutte et un caractre
national, la ncessit de relations entre les diffrentes ralits territoriales
a t prise en compte comme priorit seulement aprs fvrier . Le
syndicat, mme dbord et victime plusieurs reprises des railleries des
travailleurs, a pu cependant se poser comme unique instance en mesure de
traiter pour tous les travailleurs. Les contestations, plutt vives, nont pas
t absentes injures et bousculades contre les vendus au cours de
lassemble de la Chambre du Travail Porta Vittoria Milan en fvrier et une
bagarre avorte dans le souterrain du quai n.6 la gare centrale.
Les travailleurs les plus
actifs, qui ont fait confiance la prsume honntet et dtermination des
diffrents dlgus et envoys syndicaux, qui semblaient vouloir conduire la
lutte jusquau bout[14],
ont tenus les autres travailleurs jusquau 25, en leur faisant croire que les
quais de toutes les gares dItalie seraient occups ds 10 heures du
matin ; il sagissait bel et bien dune escroquerie, uniquement destine
crer lattente dun grand vnement , tenir lil les travailleurs et en
mme temps maintenir le moral des troupes .
Le syndicalisme de base (CUB)[15],
de son ct, a oscill entre la ncessit dՐtre reconnu au niveau de
lentreprise ( travers les lections des RSU) et la table des ngociations Rome, et un soutien tide
la lutte : son apport, durant les journes davril, a t visiblement
insuffisant (nonobstant le fait que quelques uns de ses adhrents soient
engags en premire ligne dans le conflit).
En dautres termes, le
syndicalisme de base a admis dans son action une sorte de division sociale du
travail dans la lutte : les travailleurs directement impliqus luttaient, dautres supportaient, dautres encore ngociaient ; de cette manire laction des premiers est
subordonne aux exigences de la mdiation, et vient implicitement lgitimer a
priori le rsultat de la ngociation
ellemme, quel quil soit[16].
Les travailleurs qui sont
monts sur les toits [de la gare centrale de Milan quelques jours aprs la
signature de laccord du 25 avril, et qui ont entrepris une grve de la faim,
N.d.T.] ont t lexemple vivant des oscillations continues du militant
syndical habilissime flairer les mensonges, dot dune remarquable capacit
dorganisation et dentranement, prompt prendre sur lui la responsabilit
dinitiatives de lutte de faon autonome, mais dans le mme temps capable
daccepter, et par-dessusdessus tout de faire accepter, les pires saloperies, incapables de mener jusquau
bout la critique de lorganisation syndicale, prompt prendre en charge la
dmobilisation. Ces travailleurs, peine mis au courant de la grille
technique , vendue comme un accord, ont dit que pour eux a ne changeait rien,
que ce communiqu, ils auraient pu le faire de chez eux et lexpdier, et 30 minutes aprs deux des leurs sont descendus en
dessous pour convaincre les autres de la bonne qualit de laccord.
Ils sՎtaient demands, les
jours prcdents, ou mieux les nuits prcdentes, pourquoi cՎtait eux et
quelques autres, de tout coordonner [Si erano domandati perch toccasse a
loro e a pochi altri, coordinare]
sans que les permanents bougent dun pouce, et pourtant ils se sont laisss
convaincre par ceuxci qui ont su toucher leur sens des responsabilits.
Sils nՎtaient pas descendus,
cette masse de dbiles qui contrlent encore la gare, avec sa tte quelques
jeunes cons et des vieux cons qui ne font rien dautre que semer la zizanie
(pour reprendre les mots dun syndicaliste) auraient pu sՎnerver et occuper les quais ou quelque chose de ce
genre. Dans tous les cas, sils nՎtaient pas descendus pour parler avec les
permanents, ils auraient implicitement dlgitim le syndicat.
Plus grand est le
sens des responsabilits de ces travailleurs dans les confrontations avec
lorganisation, cestЈdire plus est dvelopp leur conscience politique, et
plus est annihil leur instinct social et leur sentiment dappartenance la
classe.
Les dlgus de
gauche balancent entre la fonction de reprsentants au sein des
travailleurs des revendications syndicales et celles de reprsentants des travailleurs au sein du syndicat, demeurant quoi quil en soit embourbs dans le
marais dmocratique de laction syndicale.
La nuit du 24 avril
quand 22 heures la grves de 48 heures proclame par les syndicats tait
termine, mais on navait pas dinformations sur la marche des tractations
Rome, qui duraient depuis laprsmidi, sans quaucun dblocage ne soit
entrevue la situation est devenue encore plus problmatique.
Les dlgus,
appels par les travailleurs sur leur portable, continuaient rpondre :
Pour le moment, on ne peut rien garantir, parce que eux ne garantissent rien,
ne faites rien, nous ne savons rien, il ny a rien, restez assis l o vous
tes et ne faites rien.
Les uniques
certitudes taient dune part la pression des chefs et des petits chefs pour
faire reprendre le travail et dautre part la volont des ouvriers de faire une
grve illimite, jusquՈ lՎclaircissement dfinitif de leur propre futur.
Lentreprise navait
pas renonc, durant les jours prcdents, rquisitionner les travailleurs,
les contraignant assurer le service minimum, bien que la loi tablisse que la
rquisition tant de la comptence de la Prfecture, elle ne peut tre le fait
de lentreprise pour laquelle on travaille (encore moins lorsque lordre est
expdi par tlgramme !).
JusquՈ la nuit, en
outre, quelques travailleurs avaient continu se rendre dans les garages et
les gares, appelant ne pas travailler, tandis que les reprsentants syndicaux
cherchaient expliquer, en pur langage dmocraticosyndical, le renvoie des
responsabilits de la situation sur lentreprise , laquelle il fallait
rpondre en tenant son propre poste de travail et par lautorduction des
cadences, en essayant de faire croire aux travailleurs que Gorla [la socit
prive de nettoyage], les payerait pareil.
Dun ct les
ouvriers, comme en fvrier, navaient pas lintention de reprendre le travail,
de lautre, la pression de lentreprise et labsence dinformations prcises
nՎtaient pas faits pour les aider.
Exemplaire est aussi
la rigidit avec laquelle le mme bonze syndical a trait les informations sur
les tractations en dents de scie . [trattative saltate]
Dismoi, quelles informations officielles tu
as ?
Aucunes
Alors me casses pas les couilles ! Tu as un
reprsentant syndical ? (en
rfrence un envoy qui revenait de Rome) Tu lui fais confiance ?
Alors coute ce quil te dit !
Trs probablement, jusquՈ ce que les conditions objectives
lintrieur du processus de criserestructurationprcarisation soient matures,
il sera difficile que prenne forme non seulement une critique du syndicat, mais
de la forme et de laction syndicale en tant que telle. On ne doit pas voir
dans la rupture un donn de fait, mais une tendance qui constitue, jusquՈ
aujourdhui, une hypothse de travail politique qui coupe les ponts avec les
aspects les plus nfastes du vieux mouvement ouvrier[17].
Cette hypothse politique est interne la dialectique du
anticipersuivre et la capacit de faire prcipiter le mouvement rel,
qui est le sens profond de toute thorie et pratique dune minorit
rvolutionnaire.
III
Donc, quelle sera la mthode ? Celle de la
dmonstration thorique, de la culture ? Nous devrons attendre encore
plusieurs sicles pour prparer les proltaires ? Non, par Dieu, la voie
de la propagande nest pas la thorie mais le sentiment, en tant que celuici
est le reflet spontan des besoins matriels dans le systme nerveux.
Amadeo Bordiga
Les travailleurs, dans leur action, ne sont se pas limits la grve,
qui certes aurait occasionne quelques dsagrments mais naurait pas casse la
routine des transports de la force de travail banlieusarde et le systme de
transport ferroviaire ; ils sont alls jusquՈ loccupation des quais et
au blocage routier. Ainsi, ils nont pas limit leur rage daction une seule
gare, mais ils lont largie la ville entire, se dplaant en masse dun lieu
de travail lautre.
Du point de vue de la capacit offensive, a a t le moment le plus
haut atteint par cette lutte, qui sest dploye sur le terrain de ladversaire
le frappant quand et o il lattendait le moins, neutralisant temporairement sa
capacit de raction ils nous vacueront des quais, alors nous occupons
les rues ; ils utilisent des jaunes, alors on les fout dehors ; ils savent
que nous irons ici, alors on les attaquera ailleurs.
Limprdictibilit des actions, le caractre indchiffrable des codes
de communication, les canaux de relations invisibles ont t constamment
recherchs par les grvistes, mais pas toujours compltement raliss. Par
exemple, le matin du 22 avril, les travailleurs en repos sՎtaient donn
rendezvous la gare centrale, pour se diriger ensuite en un point prcis pour
bloquer les trains de marchandises qui transportaient des automobiles peine
sorties dusine et attendues dans lurgence. peine sortis de la gare, ils se
sont trouvs face un dploiement considrable des forces de lordre, ce qui a
empch laction programme. (Cela nest que lune des lourdes interventions
intimidatrices de la police.)
Lorsque la grve dmarre le 23 avril, les travailleurs ont une seule
chose en tte : aller sur les quais et y rester. La faon dont ils avaient teste leur force en dcembre
et en mai, travers la conqute dune identit collective, avait rendu
laction explosive. Pour cela aussi, les pratiques qui nՎtaient pas
loccupation des quais ont eu un mdiocre appeal, tant considres par les travailleurs comme une
simple garniture de la lutte, tout au plus un terrain de prparation :
on savait que la partie serait joue sur un autre mode. Ces pratiques ne font
pas autre chose que diluer le potentiel efficace de la lutte, dmoralisent,
sont synonymes de perte dargent dans lenveloppe de la paye, frustrent la volont
de faire, dsorientent : on nous disperse en autant de groupes qui
sinterrogent sur quoi faire, alors que dans laction on est un tout.
[Le chapitre IV est consacr la lutte des mineurs de Jiu de Roumanie
en 1999 ; le chapitre V aux luttes de Cellatex et Moulinex. En exergue de
celuici, il y a la citation suivante :
La classe des travailleurs et la classe capitaliste
nont rien en commun. Il ne peut pas y avoir de paix entre la faim et la
pauvret qui rgnent parmi les millions de travailleurs et les quelques uns qui
composent la classe patronale, qui possdent toute la richesse de la vie.
Prambule des IWW, 2 janvier 1905
()
VI
Le proltariat rclame une approche spcifique qui
permette de saisir le dveloppement subjectif
Le proltariat concret nest pas un objet de connaissance :
il est travail, lutte, il se transforme : on ne peut pas, en dfinitive,
latteindre thoriquement, mais seulement pratiquement, en participant son histoire
Cette classe ne peut tre connue seulement quՈ partir
dellemme, seulement condition que celui qui linterroge introduise la
valeur de lexprience proltarienne, mette les racines dans sa situation et
fasse sien lhorizon social et historique de la classe ; pour autant que lon
rompt avec les conditions immdiatement donnes par le systme dexploitation.
C. Lefort, Lexprience proltarienne. (Retraduit de litalien)..
Les luttes sales comme cellesci [y compris Cellatex et Moulinex,
N.d.T.], peuvent stimuler les militants qui entendent se librer des illusions
dmocratiques et des reprsentations sociologiques du proltariat.
Les militants qui nentendent pas tre les dindons de la farce doivent par
dessus tout comprendre ce qui se passe, participer directement et contribuer
l externalisation (pour utiliser notre manire le mot prfr des
patrons) des motifs de la lutte, en sappuyant sur luniversalit de lexprience proltarienne, sur la crativit et
sur le got pour le partage actif.
Qui a particip activement la totalit du conflit connat les
difficults auxquelles on est confront, difficults qui ne peuvent tre
rsolues par des proclamations, des slogans, des idologies et des pratiques
dappareil.
La ncessit de crer des expriences/instruments de communication
directe et de soutien mutuel (comme une caisse de solidarit, des initiatives
de contreinformations locales et des moments de rflexion collective) a
merg, une ncessit qui est et sera toujours plus lordre du jour dans les
luttes futures.
De cette faon, chacun pourra sortir du rle de tifoso et devenir coauteur de son propre destin.
Quand on participe une lutte de l extrieur , il nest pas
toujours facile de faire comprendre les raisons de son propre intrt et de sa
disponibilit pour y participer.
Expliquer que lon nest ni les reprsentants dun parti ou dun
syndicat ni des journalistes alors que lon pose un tas de questions et que
lon cherche enregistrer paroles et images , expliquer cela lorsque son
propre parcours est en devenir, nest pas simple, y compris pour soimme.
Quil sagisse de traduire un tract dans une autre langue, de
recueillir des fonds ou de mettre disposition des connaissances, des
expriences, des lieux de rencontre et des instruments de communication, la
contribution dune subjectivit militante est entirement dfinir dans la
perspective du mouvement rel.
VII
La bourgeoisie et le proltariat sont enfants dune
poque nouvelle. Tous les deux tendent, dans leur action sociale, liminer
toutes les survivances du pass. Ils doivent, en vrit, mener une lutte tout
fait srieuse, mais celleci ne peut tre mene jusquau bout quՈ partir du
moment o bourgeois et proltaires se trouvent seuls et face face. Le vieil
armement doit tre jet la mer afin que le navire soit prt pour la
bataille , la diffrence qualors la bataille ne se droule pas entre deux
navires, mais bord du mme btiment, entre les officiers et lՎquipage.
F. Engels, La question militaire prussienne et le
parti ouvrier allemand, 1865.
(Retraduit de litalien).
Au cours de la lutte le balancier peut incliner soit vers la
dissolution pratique des contenus de la civilisation du capital, soit vers sa
consolidation, en jouant sur la division et la concurrence (par
exemple travailleurs fixes contre travailleurs prcaires et vice versa,
travailleurs dune localit donne contre une autre et ainsi de suite).
Le proltariat, en tant quil est lintrieur du rapport capitaliste,
oscille entre la ncessit de sa propre reproduction sociale et la lutte
contre cette ncessit. Dans cette
dynamique interne la lutte entre les classes, il ne peut y avoir sparation des deux termes, sinon la contradiction qui est la
base de la polarisation sociale disparat [se non viene consumata in
profondit la contradizzione che sta alla base della polarizzazione sociale].
La rsolution de lՎnigme de la libration du proltariat rside dans
sa capacit librer les nergies emprisonnes dans les rapports de production
actuels, en lutilisant pour la transformation de la socit qui emporte sur
son passage tout le vieux monde de lՎconomie politique.
Qui interprte une lutte comme rupture, mme momentane, de la
reproduction des rapports sociaux capitalistes, qui pense que la tension
vers lautonomie de la classe
senregistre soit dans lapprofondissement des contradictions existantes
brisant le modle bourgeois des rapports sociaux, comme la division sociale,
raciale et sexuelle du travail , soit dans le dveloppement de capacits
dorganisation adquates au conflit, ne peut que saisir les lments positifs
prsents dans la lutte des nettoyeurs de trains.
Lappareil mobilis pour saboter la lotta sporca devait par dessus tout empcher que, pour le pont
du 25 avril, le trafic ferroviaire soit bloqu ou ralenti.
Il devait aussi empcher que cette lutte entre positivement dans
limaginaire social et quelle soit reconnue, dans ses contenus et ses formes,
comme une lutte de tous les proltaires.
()
[1] La traduction italienne dit : parce que la communaut, contre la sparation de laquelle lindividu ragit,
est la vritable communaut de
lhomme, lessence humaine.
[2] Nouveau Mouvement, H. Simon, 1974, p. 3.
[3] Lautonomie proltarienne est un processus historique
travers lequel le proltariat se rend conscient de sa propre condition et des
moyens aptes la dpasser. Quelquesuns de ces moments peuvent tre :
refus de la soumission aux lois de lՎconomie que la capital prsente comme
naturelles. En pratique, refus du productivisme et de lidologie de la
hirarchie du travail. organisation de la violence proltarienne illgale et
antiinstitutionnelle, capable de sopposer, dans la dfense de la classe, la
violence de lՃtat, non pas dans le sens de la construction du bras arm du
proltariat, mais comme autogestion de laffrontement par les proltaires
euxmmes ; critique et dpassement des conceptions hirarchiques et autoritaires
sur le terrain social et individuel (moralisme, rpression, etc.), et des
obligations fonctionnelles la soumission des proltaires la classe dominante,
par lintermdiaire de moments dorganisation qui, remettant en cause la
division entre fonctions de direction et fonctions dexcution, initie
lunification du travail intellectuel et manuel, aujourdhui dans la lutte,
demain au sein de tout le complexe de la vie sociale.
[4] Sa gnralisation lintrieur dun contexte de
difficile gestion des contradictions sociales perte de lgitimit du pouvoir
politique et chute verticale de crdibilit des organisations historiques du
mouvement ouvrier dans lesquelles une partie importante de la classe ouvrire
est encadre et encadrable ; forte tension la rupture avec lordre
social existant au cur de lexploitation capitaliste, dans le secteur
tertiaire (transports, systme de sant, entretien des aires urbaines, etc.) et
dans le systme de formation, ducatif et scolaire amnerait la formation
dorganes qui se placeraient dans une perspective de double pouvoir ; dans
un tel cas les nergies accumules par le mouvement social pourraient trouver
un dbouch insurrectionnel.
[5] fissi , en italien. Il sagit en fait de
travailleurs garantis , possdant un contrat de travail dure indtermine.
(Nd.T)
[6] La modification de larticle 18 du Statut des
travailleurs qui est un acquis de l Automne chaud de 1969 et interdit
le licenciement en labsence de cause juste , prvoit que, pour quelques
catgories de salaris, en particulier dans le Sud, et enfin de rendre plus
flexible les conditions dembauche, le licenciement reconnu abusif nentraera
plus la rintgration mais sera compens par une indemnit financire (Nd.T).
[7] La Fdration des transports de la CGIL.(Nd.T).
[8] Le march mondial du travail puise quotidiennement
dans une masse proltarise et prolrariser qui se dplace de la priphrie
aux centres de lexploitation capitaliste. Lappareil de disqualification,
mobilis par le systme dominant contre ces proltaires, rend chronique leurs
conditions dexclusion et est un lment constituant du racisme dmocratique
. ().
[9] En situation de prcariat, quand elle devient sujet
social actif dans une lutte, la force de travail multinationale peut
difficilement tre encadre et contrle par les syndicats ; dans dautres
situations, lorsquelle accde la stabilit, elle peut au contraire
constituer la colonne vertbrale de lorganisation syndicale et en devenir
lՎlment dynamique, comme cest arriv pour les secteurs manufacturiers de la
rgion de Brescia et de Varese, o la mimai a clat la premire grve de
travailleurs immigrs contre les conditions de travail et la Ligue BossiFini.
En Italie, comme cela sest pass en Allemagne, en France et en Suisse,
le syndicat peut tre un instrument dintgration et un canal de reprsentation
politique pour une partie de la
force de travail multinationale, relativement plus protge et dfendable avec
un rapport de travail plus stable, de meilleurs conditions de logement, de plus
grandes capacit linguistiques ; et cest prcisment cette plus grande
intgration qui lexpose de faon continue au chantage du licenciement.
[10] On a eu un exemple des consquences de cette attitude
le 25 avril, alors que de la table de ngociation Rome est communiqu la
grille technique (*) : il tait vident que celleci ne disait
absolument rien sur les travailleurs
prcaires (dont les contrats sachevaient le 6 mai sans quils leur soit
propos de les renouveler), mais ceux qui le feront remarquer seront peu
nombreux et quasiment personne ne cherchera lexpliquer aux intresss, pnaliss entre autre par des
difficults de comprhension dues la langue ! Vendue comme une
victoire, si elle avait t
correctement comprise dans son contenu ou mieux dans son absence de contenu
cette grille aurait fait monter la colre et provoqu la raction des
travailleurs prcaires, qui se seraient exprims immdiatement dans le blocage
des quais.
(*) La grille technique est laccord de principe sign par le gouvernement,
la Ferrovie dello Sato, les
syndicats et quelques entreprises adjudicataires, qui fixe les bases de
la ngociation venir. Pour la CGIL laccord permet de sauver loccupation,
obligeant les entreprises appliquer laccord. (Lotta sporca, p. 22) N.d.T.
[11] Par socialisation , nous nentendons pas le brin de
causette sur les journaux de foot, et les considrations sur les starlettes,
les soubrettes, le courrier des lecteurs [letterine] ou les railleries pe fa pass a jurnata [pour passer le temps, en napolitain dans le texte], mais le processus
travers lequel une condition de commune oppression est reconnue comme telle et
critique partir des divers points de vue des sujets.
[12]
Les RSU sont des sortes de conseils d'entreprise, lis
une tradition italienne remontant aux annes 70 (le nom des RSU date,
lui, des annes 80) . N.d.T.
[13] Dns la traduction italienne les groupes qui
renvoient dans le texte aux avantgardes radicales, deviennent la gauche
traditionnelle .
[14] La conscience darriver au bout de la fin na pas
dimportance que lobjectif soit atteint ou non, pour autant que ce soit en
luttant ; cest ce qui est ressorti dans plusieurs discussions avec les
travailleurs ( To the bitter end
[JusquՈ la fin amre] , dit un mineur anglais des districts charbonniers
durant la grve du milieu des annes quatre-vingt).
[15]
La
CUB (Confdration unitaire de base), s'est forme en 1991. Elle rassemble les RdB (Rappresentanze di
Base) ,
la FMLU (un syndicat alternatif fond chez les mtallos dans les annes
90). La CUB est actuellement le regroupement le plus important au sein du
syndicalisme alternatif . N.d.T.
[16]
Une gestion collective des tractations est possible,
mais elle prsuppose un niveau de non sparation entre les reprsentants
et les reprsents qui drive dun rapport de force dans lequel la
lutte conomique est un tage dun conflit plus ample qui revt les caractristiques
dune vritable guerre sociale. [la note cite ensuite lexemple des ngociations
de Dantzic en aot 1980 qui taient suivies en permanence par lensemble
des travailleurs situs lextrieur, et celui des piqueteros argentins qui ne proposent des reprsentants quau dernier
moment pour des raisons de facilit N.d.T.]. Dit autrement, le
plan de la lutte et le plan de la ngociation sont des plans diffrents
et par certains cts antithtiques, dans lesquels le premier peut tre
dirig par les travailleurs euxmmes, et cest le seul plan sur lequel
ils peuvent se commettre ; lautre, moins dune mise en uvre absolument
transparente et assembliste des tractations, conduit en grand secret
et sans possibilit de contrle, est un plan sur lequel on ne doit pas parier
un sou !
[17]
On peut faire remonter le dbat sur le vieux mouvement
ouvrier ces petits groupes ou individus isols qui dans les annes 30
essayent de faire un premier bilan des expriences rvolutionnaires des
annes du premier aprsguerre () [Le reste de la note fait rfrence au
communisme des conseils et
cite Bourrinet, Canne Meier. N.d.T.]