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Les trois ges de loprasme

Une critique communiste

 

(Loperaismo tra mito e lustrini)

 

Centro di Ricerca per lAzione Comunista (2002)

http://www.autprol.org/

 

Traduction C. Charrier

 

 

1. De la crise Hongroise aux Quaderni Rossi. . R. Panzieri. 1956 1964

2. De la Piazza Statuto Classe Operaia. M. Tronti. 19621967

3. De Potere Operaiai lAutonomie. A. Negri. 19681978

Conclusion : loprasme entre mythe et paillettes

 

 

1. De la crise Hongroise aux Quaderni Rossi. R. Panzieri. 19561964[1]

 

On peut faire remonter la naissance du courant dfinit comme operaste la fin des annes cinquante. Au cours de ces annes, dans laire occidentale, le pouvoir de la bourgeoisie apparaissait comme tant exceptionnellement solide et capable de produire un consensus travers une augmentation graduelle des salaires et par une amlioration consquente des conditions de vie de la classe proltaire. Le mouvement ouvrier officiel (les partis et les syndicats de gauche) connaissaient alors un processus dalignement sur les rgles de la socit occidentale, non seulement dans les faits mais aussi du point de vue de son identit et de sa problmatique, qui touchait galement les partis staliniens euxmmes dont le prtendu antagonisme lOccident se jouait tout entier sur lՎternelle attente des conditions favorables pour une rupture rvolutionnaire, avalisant de fait une pratique socialdmocrate, conduite en plus dune faon autoritaire et religieuse. Dans ce contexte, les vnements de Hongrie bouleverseront une bonne partie de lintelligentsia de gauche, italienne et internationale.

 

Panzieri, un des auteurs les plus reprsentatifs de ce courant militant du PSI, entrevoyait une crise du mouvement ouvrier traditionnel. Pour endiguer ce processus il tait opportun dinitier une recherche indpendante, qui se dbarrasse des lments dinterprtation traditionnels, de manire permettre de redcouvrir une tradition de classe authentique dans le devenir historique du conflit entre le capital et le travail, en passant pardessus lencadrement organisationnel du vieux mouvement ouvrier cras sous le contrle stalinien. En 1959 il nouera des contacts avec des lments de la gauche du PCI qui opraient dans la FIOM[2] de Turin, tel que Foa, Tronti, Asor Rosa et della Mea. Il initiait de cette manire une recherche sur le mouvement ouvrier, du contrle ouvrier la recherche de son objet, de l enqute ouvrire pour une dfinition de la composition de classe la dfinition de la dmocratie directe . Panzieri tait conscient du clivage qui sՎtait ouvert en 1956 avec le XXme Congrs du PCUS (dstalinisation de lURSS et voie pacifique au socialisme) et avec les vnements de Hongrie, mais il ne les prenait en compte que du point de vue du mouvement ouvrier officiel. Il ne retenait pas de lexprience hongroise lexigence dautoorganisation proltarienne qui en drivait, mais se limitait constater combien la dgnrescence de lURSS tait dfinitive.

 

Ce retard nexistait pas dans les courants de l oprasme hors dItalie. Socialise ou Barbarie en France, Correspondance aux USA, Solidarity en GrandeBretagne[3], retenaient des journes hongroises lՎcart qui existait entre le mouvement ouvrier et sa contrefigure officielle. Ils voyaient dans laffrontement entre les bureaucrates et lantibureaucratie (dmocratie directe) lamorce dune perspective nouvelle pour le mouvement ouvrier. Ils focalisaient leur analyse sur le bras de fer qui existait entre la bureaucratie capitaliste et le mouvement de lutte antibureaucratique. Par rapport lURSS, cette critique, bien que cela ne pouvait tre suspect lՎpoque, tait toutefois insuffisante dans la mesure o en dfinissant lURSS comme un rgime capitaliste dՃtat, elle se limitait une critique gestionnaire et formelle, nabordait pas la question de la nature des rapports de production capitaliste et celle corollaire des classes sociales[4]. Le mode de production capitaliste, toujours plus intgr au niveau national et international, tait analys dans les catgories de la bureaucratisation et apparaissait comme une immense machine dont la conduite chappait la bourgeoisie et qui se rduit un complexe organique social capable dՎliminer les crises classiques de surproduction, avec le chmage de masse pour consquence, la baisse des salaires, les luttes explicitement rvolutionnaires. Le bloc capitaliste dՃtat tait interprt comme la variante la plus importante de bureaucratisation, faisant du phnomne un processus unitaire. Ils retrouvaient les chos antibureaucratiques de Trotsky en inversant lordre des facteurs : pour Trotsky, en tant quՃtat dgnr, lURSS tait la plus proche du socialisme , tandis que pour les oprastes hors dItalie , lURSS tait le modle spcifique qui aurait reprsent lՃtat pour le capitalisme au niveau universel, et les luttes qui s dveloppaient dans ces pays taient les anticipations des luttes futures. En fait le capitalisme dՃtat tait le maillon faible de la chane, qui ne pouvait se dvelopper diffremment du fait de sa concurrenceЎquation avec le monde libre . La bataille cyclopenne du capital travers les monopoles, mettait en lumire un systme qui basait sa force sur le production du secteur primaire et qui garantissait sa prennit par un systme colonial impos. Les luttes dans les pays de lEst, pour tre importantes du point de vue de la perception de lexprience proltarienne, restaient emptres dans un schma lgu par la composition sociale retardataire du capitalisme. La forme conseilliste ellemme, que lon pouvait observer de fait en Hongrie, sans en faire une considration absolue, tait un type dorganisation li la grande industrie mcanique prpondrante dans les pays de lEst, et reprsentait un stade dՎvolution de lorganisation du travail dpass n Occident.

 

Sur le contenu des pays socialistes, Panzieri et le courant opraste nont rien crit qui remette en question le caractre socialiste de ces pays. Dans le texte de 1957 Notes pour un examen de la situation du mouvement ouvrier, on voit comment lauteur accepte en bloc lidologie stalinienne du socialisme dans un seul pays. Pour Panzieri, sil y a jamais un problme, cest celui dhumaniser ce rgime en donnant plus de dmocratie et de participation ouvrire. Sa thse est que la ncessit de dfendre lՃtat socialiste a amen anticiper les transformations des rapports de production dans un sens socialiste en collectivisant et industrialisant trop rapidement lURSS ; et ce nest pas un hasard sil regardait avec intrt les expriences Yougoslaves, Chinoises et Polonaises, do arrivaient des conseils d autonomie et de libration La ralit sest montre pour le moins brutale et dsacralisante.

 

La revue qui concrtise les efforts de Panzieri sera Quaderni Rossi. Au cours de cette exprience le contenu des luttes sՎclaircit : pour QR les luttes salariales deviennent des luttes pour le pouvoir. la revue collaborent des militants sortis des partis de gauche ou qui y sont encore inscrits. S. Garavini, Foa et Alasia (qui sՎloignera rapidement) collaborent au premier numro qui suscite beaucoup de perplexit dans le mouvement ouvrier officiel.

 

Le point de dpart de la rflexion de Panzieri est la centralit du rapport de production et la critique de la prtendu neutralit du dveloppement technicoscientifique, en contestant lide dune rationalit du procs productif distincte des ncessit de laccumulation capitaliste. Sulluso capitalistico delle macchine nel neocapitalismo[5] est paru dans le numro 1 des Quaderni Rossi. Cet usage capitaliste des machines nest pas une dviation par rapport un dveloppement pour ainsi dire normal de la croissance capitaliste, mais dtermine le dveloppement technologique et, avec lui, lassujettissement de louvrier la machine ellemme, laquelle est la personnification du despotisme dusine sur louvrier devenu dsormais appendice de celleci. Lhabilet de louvrier dans le maniement dun outil parcellaire ne compte plus dans la mesure o la technologie incorpore dans le systme capitaliste devient habilet particulire de masse de louvrier au service dune machine particulire qui lenchane.

 

Le progrs du capital se prsente comme existence du capital et le processus dindustrialisation sempare de couches toujours plus avances du progrs technologique, do la ncessit dun plan pour lier les ouvrier au systme de machine quest lusine. Alors, la tendance de la lutte des ouvriers est daller vers des formes gestionnaires, ou bien vers la gestion du pouvoir politique et conomique dans lentreprise et, partir delle, dans lensemble de la socit. La lutte investit lensemble de la socit : pratiquement et immdiatement cette ligne peut sexprimer dans la revendication du contrle ouvrier. Ces thses gestionnistes trouvent quelques chos dans le milieu du mouvement ouvrier du dbut des annes soixante, retenues comme un retour Marx et au communisme rvolutionnaire, alors quells sont bien en dea de la critique communiste de la valeur, en ne reprenant pas la radicalit de lanalyse marxienne.

 

Souvenons-nous que, loin des sunlight de lhistoire, dj en 1957, Bordiga sՎtait appuy sur les Grundrisse pour montrer comment le travail collectif de louvrier est absorb par ce Moloch quest le capital fixe, et qui saccrot au dpend du travail vivant pour parvenir la perspective non de la domination du travail vivant sur le travail mort (thse gestionniste) des Quaderni Rossi, sur la matire premire, mais au fait que le dveloppement des machines et lautomation annonce la socit qui voit le dclin de la mesure du temps de travail par la valeur.

 

Dans Plusvalore e pianificazione, appunti di lettura del Capitale[6], Panzieri crivait en 1966 : Il y a en effet dans la pense marxiste aprs Marx, un moment de reconnaissance du virage qui sest vrifi dans le systme avec lapparition du capitalisme monopoliste et de limprialisme autour des annes 70 (et qui aujourdhui nous apparat comme une priode de transition par rapport au tournant qui, initi dans les annes 30, est en passe de sachever). Mais lanalyse et la reprsentation de la nouvelle phase naissante avec ce tournant a t mise immdiatement en relation avec des lois quellemme tendait dpasser ; et elle a en consquence t interprte comme stade ultime. Et en note il ajoutait : la mythologie du stade ultime du capitalisme est prsente, avec des fonctions idologiques diffrentes, chez Lnine comme chez Kautsky : chez Lnine pour lgitimer la rupture du systme aux points les moins avancs de son dveloppement, chez Kautsky, pour sanctionner le renvoi rformiste de laction rvolutionnaire la plnitude des temps. Cest parce que la rvolution de 17 na pas russi faire la soudure avec la rvolution dans les pays avancs quelle sest replie sur des contenus immdiatement ralisables par rapport au niveau de dveloppement de la Russie ; et le manque dՎclaircissements sur la prsence possible du rapport social capitaliste dans la planification (insuffisance qui persiste dans tout le dveloppement de la pense lniniste) facilite par la suite la rptition dans les rapports de production, soit dans lusine, soit dans la production sociale densemble, de formes capitalistes, derrire lՎcran idologique de lidentification du socialisme avec la planification et de la possibilit du socialisme dans un seul pays.

 

Panzieri attaquait la faon dont sՎtait consolid, de la IIme Internationale la IIIme, la conception optimiste du processus historique qui poussait lattente de lachvement automatique du stade suprme du capitalisme ; il entendait rcuprer tout laspect politique actif, rvolutionnaire, du discours marxiste, contre le positivisme vulgaire qui considrait la crise mortelle du systme comme un fait inluctable, en connexion avec le simple dveloppement quantitatif des forces productives. Du point de vue de lhistoire, la polmique de Panzieri se retournait contre lusage instrumental qui tait fait dans le mouvement ouvrier du discours sur le caractre objectif et ncessaire des lois qui gouvernent le dveloppement capitaliste, un usage qui tendait laisser dans lombre ou au second plan la contradiction entre le capital et le travail et lurgence dune facilitation de lorganisation du contrle ouvrier sur lensemble du procs productif. La volont de fournir une base thorique ce projet portait Panzieri creuser la critique de lՎconomie politique de Marx afin dy retrouver les lignes dun dveloppement analytique sans rsidus de loi du plan et de loi de la valeur. Le dveloppement du discours de Marx, du premier au troisime livre, en venait ainsi concider avec le dveloppement historique du capitalisme luimme, de la phase concurrentielle au stade monopoliste. Le plan nՎtait pas ici entendu comme un projet singulier et particulier de programmation, comme dans la forme historique de dveloppement. Il sagissait donc pour liminer tout rsidu naturaliste de la thorie du dveloppement historique du capitalisme, de dmontrer le dpassement advenu de la dichotomie (encore prsente chez Marx dans le premier livre du Capital) entre le despotisme dans lusine et lanarchie dans la socit civile, de dmontrer que la dynamique unique du processus capitaliste est en substance domine par la loi de la concentration et, en allant audel de Marx, que le stade le plus haut du dveloppement, et en mme temps de lautonomisation du capital, nest pas celui du capital financier, mais celui du capitalisme planifi. Avec la planification gnralise, selon les conclusions de Panzieri, toutes les traces de lorigine et des racines du procs capitaliste disparaissent dans la mesure o a t radicalement dpass le mode de production inconscient, anarchique.

 

ct de a le processus historique de cohsion croissante du systme se prsente dans sa totalit compltement autonome par rapport aux agents de la production, caractris sur le plan social densemble par la mme rationalit despotique en vigueur dans lusine moderne qui se nourrit des possibilits dmesures que lui confre lusage capitaliste de la science et de la technique, comme Panzieri le montre dans Sulluso capitalistico delle macchine nel neocapitalism. ce point Panzieri, sautant pied joints pardessus un nud fondamental du discours de Marx (surtout prsent dans les Grundrisse) dont il avait soulign la complexit, arrive la conclusion que les contradictions imminentes ont perdu leur caractre naturaliste, propre la phase concurrentielle : les contradictions imminentes ne sont pas dans le mouvement des capitaux, elles ne sont pas internes au capital : la seule limite au dveloppement du capital nest pas le capital luimme, mais la rsistance de la classe ouvrire.

 

Cette conclusion de Panzieri opre une totale rvision de lՎnonc marxien selon lequel le vritable obstacle de la production capitaliste, cest le capital luimme et en mme temps attaque les fondements mthodologiques de la dmarche dialectique de la critique de lՎconomie politique. La dialectique du mode dexposition prconis par Marx consiste dans la comprhension du mouvement des catgories comme mouvement autocontradictoire du capital, comme autocritique du systme dans les limites de sa propre objectivit catgorielle, du point de vue bourgeois luimme. Une autocritique qui renvoie au caractre historique, donc la caducit, du mode de production bas sur lՎchange de marchandises. Pour Marx : il existe par dessus tout une limite, non inhrente la production en gnral mais la production base sur le capital (Grundrisse). Lhorizon de cette limite, qui est reprsente par le capital luimme, le mouvement autocontradictoire du capital est expos par Marx dans la dialectique limites/obstacle : Tout dabord : le capital contraint les travailleurs dpasser la limite du travail ncessaire pour produire une plusvalue. Ce nest quainsi, quil se valorise et cre la plusvalue. Mais dautre part, il pose le travail ncessaire seulement dans la mesure o et pour autant quil est du surtravail et que celuici, son tour, est ralisable comme plusvalue. Il pose donc le surtravail comme condition du travail ncessaire et la plusvalue comme limite du travail objectiv, de la valeur en gnral. Tant quil ne peut pas poser ce dernier il ne pose pas non plus le premier, pas plus quil ne peut le faire sur la base de celuici. Il limite donc par un obstacle artificiel le travail et la cration de valeur, et il le fait pour la mme raison et dans la mesure o il cre le surtravail et la plusvalue. Il pose donc, du fait de sa nature, un obstacle au travail et la catgorie de valeur, lequel contredit sa tendance sՎtendre audel de toutes limites. Mais prcisment parce que dune part il pose un obstacle spcifique et que dautre part il tend dpasser tous les obstacles, il est la contradiction vivante. [7] Parce que la valeur constitue la base du capital, poursuit Marx, et que celuici existe ncessairement seulement pour autant quil ralise un change avec un quivalent, il doit ncessairement procder un mouvement rpulsif visЈvis de luimme. Un Capital universel qui naurait pas en face de lui dautres capitaux avec qui changer et du point de vue actuel il na rien dautre en face de lui que le travail salari ou luimme est pour cette raison une absurdit. La rpulsion rciproque des capitaux est dj implique dans le capital en tant que valeur dՎchange ralise. [8]

 

Il est vident que la profonde signification dialectique (en aucune faon rductible une allgorie ou une mtaphore) de cet expos disparat si la limite du dveloppement du capital nest pas constitue par le capital luimme. Si la dialectique limite/obstacle disparat, cestЈdire la possibilit pour le capital de sautocontrarier, cest galement la mouvement du capital qui disparat et par consquent la possibilit thorique ellemme dune critique de lՎconomie politique.

 

Pour les Quaderni Rossi, la dpendance des travailleurs la machine se diffuse dans toute la socit et cest partir de l que Panzieri rcupre la contribution de la sociologie comme reconnaissance de lextranit subjective de louvrier au travail dans lusine. Et cest partir de l quapparat loutil enqute ouvrire dont le but est la connaissance du type de conscience que les travailleurs ont deuxmmes, ou de leurs attitudes politiques particulires. La conscience et le type de jugement que portent les ouvriers sur divers faits qui les concernent, alors que le comportent pratique intresse les militants des QR pour dcouvrir ce que traduit en pratique un certain jugement. Diverses questions sont donc poses aux ouvriers afin de reflter et de faire remonter un jugement. CՎtait l une dmarche idaliste dans la mesure o cela suppose quil est possible dՎtudier les rapports entre la connaissance, le jugement et le comportement et voir si, en gnral, un type de comportement correspond un certain type de jugement et, partir de l, un certain type de comportement. Idaliste en ce que la classe ouvrire, en gnral, juge et comprend aprs avoir agit, en ce que la classe ouvrire ne formule pas une pens laquelle elle adapte son comportement mais fait exactement le contraire.

 

Les Quaderni Rossi consacrent de nombreuses pages lanalyse sociologique de la composition ouvrire. Dans le numro 4 sont dfini quatre niveaux didentit de la classe ouvrire :

       laspect conomique, cestЈdire le niveau salarial ;

       laspect laborieux, cestЈdire le type de travail de louvrier ;

       laspect relationnel, cestЈdire lensemble des relations sociales en dehors du travail ;

       laspect normatif, cestЈdire la vision que louvrier a de la socit.

Il ressort de lenqute que louvrier a amlior sa position conomique jusquՈ le faire se rapprocher de celle des employs, mais sa mentalit est diverse, par exemple lՎgard des syndicats et par rapport aux luttes. Lenqute se poursuit en analysant les figures professionnelles de louvrier mtallurgiste, de louvrier de mtier, de louvrier prpos au montage et de celui attach aux machines automatiques. La classe ouvrire est ainsi conue comme un ensemble dunits sans relations entre elles, comme un monde non communiquant, dont limportance rside dans le rapport avec la machine ellemme, entendue comme valeur dusage et non comme capital fixe qui suce la plusvalue au travailleur collectif. On en arrive ainsi lapologie du nous fabriquons , de louvrier au sens strict, cestЈdire du travailleur manuel, possiblement syndiqu qui, jusquՈ un certain point, ne correspond quՈ louvrier mtallurgiste. La dimension de lenqute ouvrire sousestime les implications des autres courants oprastes de lՎpoque, ne rcuprant que la dimension sociologique du marxisme sans russir, au final, individualiser dans le proltariat un sujet historique/social en formation[9],

 

Dans Lexprience proltarienne de Lefort[10] est assum le caractre de la classe comme fusion de toutes les couches sociales qui tombent dans la condition salarie et qui en portent la culture pratique, les comportements et lidentit. La classe, par consquent, est dj sujet de lhistoire et seule la division aline du travail, oprant lintrieur du mouvement ouvrier luimme sous la forme de la sparation entre thorie et pratique, entre classe et organisation, entre luttes immdiates et critique du capitalisme, tend faire disparatre de la rflexion et de la connaissance ce fait de la subjectivit historique de la classe. Une subjectivit qui est, en consquence, fonction dune force qui oprerait dans le sens de lՎmancipation du proltariat et qui rassemble dans lexprience proltarienne les embryons dautoconstruction subjective en force dopposition lexploitation. condition de ne pas se fossiliser sur les questions dorganisation et de gestion du travail, lobservation de la vie dusine permet de mettre en lumire le sens communiste de la lutte des proltaires[11]. Le tmoignage quapporte Louvrier amricain, publi dans les premiers numros de Socialisme ou barbarie allait dans cette direction. Lexprience proltarienne de Lefort, sans doute le texte le plus profond de Socialisme ou barbarie, cherchait une mdiation entre la misre de la condition proltarienne et la rvolte ouverte contre le capital. Cest en luimme que le proltaire trouve les lments de sa rvolte et le contenu de la rvolution, non dans une organisation pose comme un pralable et qui lui apporterait la conscience ou lui offrirait une base de regroupement. Lefort voyait le mcanisme rvolutionnaire dans les proltaires euxmmes, mais en se centrant plus sur leur organisation que sur leur nature contradictoire (le proltariat comme lment de ngationaffirmation du capital). Ainsi, il finissait par rduire le contenu du socialisme la gestion ouvrire.

 

Pour Quaderni Rossi les luttes de la FIAT[12] donnent le signal pour le pouvoir ouvrier dans lusine et indiquent la FIOM locale comme lorganisation apte recueillir le potentiel de la lutte. Mais ce pouvoir tait conu comme contractuel et gestionnaire lintrieur des rapports capitalistes et en mme temps comme un pouvoir incompatible avec la socit existante et alternatif. QR ne russissait pas comprendre que mme si le pouvoir ouvrier apparat incompatible avec le commandement capitaliste dans lusine, il est de toute faon et toujours lintrieur du mode de production capitaliste qui a son centre de pouvoir dans lՃtat et non dans la direction de lusine ou, pour le dire plus justement, dans les rapports sociaux capitalistes.

 

Le gestionisme de QR se manifeste dans toute son ampleur dans le fait de dsigner lusine comme un lieu physique et jamais lentreprise comme entit conomique. Une telle distinction est importante dans la mesure ou le communisme est labolition du travail salari et de lՎchange et verra ncessairement la fin de lentreprise.

 

Pour QR, au dbut des annes 60, le problme est lopposition ouvrire la planification du capitalisme italien qui avait men le PSI dans le gouvernement et maintenu le PCI, rtif, dans lopposition. La riposte selon QR avait t fournie par la classe ouvrire avec la revendication du pouvoir ouvrier dans lusine, rclamant implicitement la gestion ouvrire qui liminerait les capitalistes et les gaspillages. CՎtait l lutopie des Quaderni Rossi : le capitalisme sans les capitalistes. Le capitalisme gr par de braves ouvriers qui sautoexploiteraient. Dautre part Marx dj avait dit que le capitalisme tend liminer les capitalistes comme personnes. QR ne concevait pas la fin du travail salari, mais au contraire une gestion directe par les ouvriers.

 

Comme chez les camarades franais, le problme tait rduit la question du qui produit, du comment on sorganise, non de la production en soi. Cet ordinovisme [13] en retour touchait autant les italiens que les autres groupes hors Italie, incapables daller audel de la gestion du prsent. LՎcart historique avec la rvolution passe tait trop profond pour permettre de concevoir le processus rvolutionnaire comme expression des rapports sociaux communistes qui supplantent, en se greffant sur ceuxci, les vieux modles de production. Si dans tous les courants hors dItalie il y eut une capacit relative didentifier dans les luttes la force de transformation du prsent, cestЈdire didentifier ici et maintenant les formes de coopration sociale qui annoncent un dpassement du mode de production capitaliste, cette capacit est reste au stade des formes sans aller jusquau contenu du communisme. La mme diversit de vue par rapport aux organisations officielles voyaient les courants hors Italie plus attentifs aux phnomnes dautoorganisation du proltariat antittique au prsent, par rapport la version des Quaderni Rossi pour laquelle lutilisation des vieilles formations tait implicite. Un lment commun tout cet arc politique tait le quasidsintrt pour le dbat sur la crise. N dans une priode de boom conomique la perception de la proltarisation sociale croissante et la crise conomique, taient relgues dans une conception marxiste errone du dveloppement historique du systme de production capitaliste.

 

Il reste nanmoins un dnominateur commun entre loprasme en Italie et les groupes hors Italie : limpasse objective quune poigne de militants se trouve vivre dans les froides annes 50, crase par le dveloppement du capital, la division monopolistique de la plante et avec les coups de la contrervolution encore prsente. Cette course aprs lidentification dun sujet, dune autonomie propre au proltariat, en sՎcartant invitablement du champ de la critique de lՎconomie politique au profit de la sociologie, tait la dmonstration de la fin du mouvement ouvrier, incapable dexprimer au niveau social un force rvolutionnaire propre anticapitaliste. Cette sparation sans appel entre le projet rvolutionnaire et la matrialit de laffrontement de classe sera le plus gros frein au dveloppement de cette tradition politique.

 

 

 

2. de la Piazza Statuto Classe Operaia. Tronti. 19621967

 

Le second grand moment de lopraisme italien souvre avec le passage des Quaderni Rossi Classe Operaia. Classe Operaia nait comme revue du groupe de Rome de QR en 1964. Dj, dans quelques articles de Tronti dans QR tait apparue une divergence de fond par rapport Panzieri. Alors que pour ce dernier cest le dveloppement capitaliste qui dtermine le niveau de la lutte ouvrire, pour Tronti cest le niveau de celleci qui dtermine le dveloppement. En outre, la non dfinition de la nature des partis dit ouvriers amne QR dans une impasse sur laquelle se forme la fronde qui donnera naissance Classe Operaia.

 

La signature du contrat dentreprise la FIAT, plus ou moins en marge de la CGIL amne aux fameux vnements de Piazza Statuto Turin avec lassaut du sige de lUIL[14]. Le groupe de Panzieri a une attitude prudente sur les objectifs et les mthodes de lutte pour parvenir une recomposition de la classe ouvrire,tandis que le groupe de Tronti retient quil est possible de forcer la situation en crant les outils organisationnels ncessaires lintervention directe dans les usines, autrement dit une nouvelle organisation ouvrire. Il ne sagit pas encore de considrer que le PCI est mort pour la lutte de classe mais de construire une organisation qui se pose de manire autonome comme un stimulus direct face au PCI et la gauche traditionnelle. Cest ainsi que nat la nouvelle revue qui porte comme soustitre Journal politique mensuel des travailleurs en lutte. Dans le premier numro, il y a lun des plus fameux article de Tronti : Lenin in Inghilterra[15]. Pour Tronti il nest pas vrai quil y a dabord le dveloppement capitaliste et puis la lutte ouvrire, la question est renverse : la lutte de classe est premire[16], le dveloppement capitaliste lui est subordonn et dtermin par elle.

 

Pour Tronti, par consquent, la baisse tendancielle du taux de profit nexiste pas, ainsi que la surproduction. Au dpart, il y a la lutte tel est son leit motive. Entre les deux ples du rapport de production capitaliste, Tronti ne parvient nen voir quun : le proltariat, cestЈdire la classe ouvrire dusine. Dans le mme article Tronti (nous sommes en 1964) crit que les ouvriers se trouvent socialement audel des vieilles organisations et endea dune nouvelle, donc ils sont sans organisation, politique, rformiste ou rvolutionnaire. Pour lui, le PCI nest pas du tout un parti bourgeois mais un parti ouvrier en voie de dgnrescence, mme si le centregauche pourrait le contraindre sopposer au systme. Il existe un rformisme du PCI et un rformisme capitaliste, la classe ouvrire doit utiliser le premier contre le second. En consquence, du ct ouvrier, il y a urgence dun appuis stratgique au dveloppement du capital et dune opposition tactique envers les modes particuliers de ce dveloppement. Le subjectivisme de Tronti se voit galement dans son article Vecchia tattica per una nuova strategia[17], dans lequel on peut lire que la crise de 1964 est due une croissance des salaires plus leve que celle des profits, crise provoque par les luttes ouvrires[18]. Lexact contraire de ce quՎcrivait Marx : une rvolution nest pas possible si elle ne suit pas une nouvelle crise.

 

Dans les annes 50, la classe ouvrire retrouve la lutte conomique, limpose aux syndicats un niveau qui attaque le pouvoir capitaliste et pousse le capital se dvelopper. lintrieur de ce type de dveloppement, il y a un espace pour la revendication du pouvoir ouvrier. Selon Tronti la lutte conomique devient politique non par transcroissance, mais prcisment parce que en tant quՎconomique elle met en crise les patrons. En fait, il crit : lusage ouvrier de la lutte syndicale a dpass et battu, au cours de ces annes, lusage capitaliste du syndicat , et encore : la loi de dveloppement : plus la croissance du niveau politique de la classe ouvrire augmente, plus le syndicat tend sՎloigner des intrts immdiats des salaris pour les intgrer compltement dans lintrt capitaliste. Il ne sagit pas de faire obstacle cette tendance mais de lutiliser, avec la revendication daugmentations salariales, ce qui entrave le mcanisme daccumulation capitaliste avec un rsultat immdiat politique, avec un rapport de force favorable la classe ouvrire dans lusine. Loprasme voit dans lusine le centre de lunivers capitaliste. Cest lusine quil faut conqurir, non lՃtat quil faut abattre ! Ce nest pas un hasard si lidalisme de Tronti portera celuici mythifier larticle de Gramsci La rivoluzione contro il Capitale[19], un article de claire inspiration sorelienne qui mconnaissait le rapport entre crise mondiale et rvolution, pour se compromettre compltement avec la capacit organisationnelle du parti bolchevik.

 

Si lon veut rsumer le schme de loprasme trontien, on peut le rduire la formule suivante : dans la dialectique ouvrier/capital cest toujours ce dernier qui court aprs la combativit des premiers. chaque moment les rapports de force se dfinissent partir de la connexion existant entre la figure matrielle de la classe ouvrire et la forme de commandement capitaliste dans lusine qui lui correspond.

 

On a donc une succession de typologies ouvrires qui se supplantent historiquement. Le passage de la chane de montage et lorganisation scientifique du travail est ainsi lu comme destruction de la figure de louvrier professionnel et de sa force contractuelle. Par sa place dans le procs de production, le nouvel ouvrier appel ouvriermasse se trouve, la diffrence de louvrier professionnel qui vit une dimension plus humaine du travail, dans une situation de totale sparation et dantagonisme au mode de production capitaliste. Dans la chane de montage le refus du travail se consolide, mme si cest un fait qui caractrise les luttes ouvrires tout au long du XIXme sicle. Chaque phase de lutte, pour ce type danalyse, se trouve en rapport direct avec un niveau dtermin de composition de la classe ouvrire. On a ainsi une continuelle recompositiondcomposition de la classe qui accompagne lՎvolution des luttes entre le capitalisme et le proltariat.

 

Dans le postcriptum au livres Ouvrier et capital, Tronti clbre les luttes ouvrires du New Deal comme ayant atteint un maximum de radicalit, quil identifie aux vritables causes de la rvolution keynsienne. Le capital doit cder face la mare montante. Les ouvriers arrachent un revenu extrieur au rapport immdiat dexploitation. Cest la naissance du welfare, de lassurance sociale, de lallocation de chmage, des congs pays, la naissance du soidisant salaire social.

 

Nous croyons toutefois que la leon historique est totalement diffrente. En fait, ce cycle de lutte na jamais chapp au contrle global du capital[20].. Le mouvement des grves clate aprs 1933 et cest le prix que paye le capital pour effectuer sa rorganisation On arrive ainsi dterminer une apprciation sociologique de la composition de classe pour en tirer ensuite un jugement politique. Ainsi, le patrimoine du mouvement communiste est compltement ignor qui rside dans le fait davoir pos le problme de lautonomie du proltariat, non seulement par rapport au capital, mais aussi par rapport toutes les institutions qui, comme les partis et les syndicats, prtendent le reprsenter. Ce nest pas un hasard si Tronti a fini par justifier son retour dans le camp de la contrervolution (le PCI) en dfendant lutilisation ouvrire des institutions.

 

 

 

3. De l Automne chaud Potere Operaio. A. Negri et lAutonomie. 19681978.

 

Aprs Classe Operaia, loprasme souvre une srie infinie de groupes, de microparti et de revues, stimuls par la reprise explosive des luttes ouvrires en Italie la fin des annes 60. La forme la plus importante et la plus originale que prend loprasme cette poque et sans conteste celle que lon trouve dans Potere Operaio, qui donnera naissance aprs sa dissolution tous les groupesrevues qui exerceront leur hgmonie sur l soidisant mouvement politique autonome.

 

PO se dissout en 1973, mais le travail thorique continue. Avec le cycle de luttes de la fin des annes 60 louvriermasse a mis en crise lՃtatPlan. Une nouvelle recomposition est ncessaire. Le centre des luttes est lusine : tiersarisation de la production, automation du travail et rvolution cyberntique. La crise de lՃtat garant de lassurance sociale et de la cassa integrazione[21] dborde sur une nouvelle restructuration qui modifie profondment la composition de la classe et cre un nouveau sujet : louvrier social. Linsubordination ouvrire, confine au dpart dans lusine, sՎtend dsormais tous les aspects de la vie. Si dans la nouvelle situation le commandement du capital devient diffus, les comportements de refus ouvriers se gnralisent lensemble du territoire usine diffuse. Les comportements tendent une transformation de la valorisation capitaliste en autovalorisation ouvrire. Un des thoriciens qui donnent vie cette analyse est Toni Negri

 

Selon Negri les catgories marxienne contiennent une dualit permanente que lon ne peut supprimer, la dualit dans la forme dantagonisme et lantagonisme comme renversement. Utiliser les catgories marxienne cest par consquent les tirer vers la ncessit du renversement. Lantagonisme, en plus dՐtre le moteur du dveloppement du systme, est une catgorie centrale de la connaissance de celuici. Reconnatre lantagonisme et le porter jusquau renversement, tel est le chemin propos. Contre la valorisation capitaliste il existerait donc une autovalorisation proltarienne. Tandis que la premire est centre sur le mouvement de la valeur dՎchange, la seconde se fonde sur la libration des besoins nouveaux, donc sur la valeur dusage. De ce point de vu le communisme revint au parcours dautovalorisation ouvrire et proltaire, cestЈdire au renversement pratique des catgories capitalistes.

 

Negri croyait que la valeur dusage ne serait rien dautre que la radicalit de lopposition ouvrire, la potentialit subjective et abstraite de toute sa richesse, le jaillissement de chaque sensibilit humaine. Il croit en consquence que la valeur dusage et la valeur dՎchange se combattent comme ples antagonistes des deux classes en lutte. Pour Marx, ce dualisme est priv de sens. La valeur dusage constitue seulement la base matrielle de la valeur dՎchange, la condition de sa circulation et de son accumulation. Entre les deux il nexiste pas dantagonisme mais au contraire une contradiction. Ce qui revient dire que la tendance du capital la valorisation sauvage entre en contradiction avec la possibilit relle de celleci. Des valeurs dՎchange qui ne se convertissent pas quelque part dans la circulation en valeur dusage pour quelquun cessent dՐtre des valeurs tout court[22]. Quant aux besoins ouvriers, lunique chose dire est que le capital les suscite et ne peut quasiment jamais les satisfaire. Il est vident que souvre l une possibilit de lutte, mais cest une autre histoire que construire sur les besoins et sur la valeur dusage une thique de libration. La valeur dusage est transforme en une catgorie humaniste qui lgitime le projet subjectif de louvrier social et, prcisment, son autovalorisation.

 

travers quels comportements cette autovalorisation peutelle tre identifie ? Fondamentalement partout o le proltariat arrache un revenu en dehors du rapport classique dexploitation, cestЈdire du salariat. Ainsi tout est autovalorisation : des comportements extralgaux des jeunes proltaires la dpense publique, en passant par lՎconomie souterraine Ce nest pas un hasard si laire soidisant Autonome est sortie mal en point, dans sa composante rebelle, dans le dbat sur le tierssecteur, incapable partir de son matre penser commun, dopposer une critique srieuse lՎvolution rformiste du mouvement. Sur ce prsuppos politique de lautovalorisation ouvrire, se greffe un autre paradigme thorique : la soidisant thorie d l exode et de la fin relative du travail qui se greffe ellemme sur lanalyse du rle croissant du travail intellectuel et de la production immatrielle. Aprs le lien dveloppement du capital luttes ouvrires (qui maintenait au centre la question du travail salari), aprs lautovalorisation ouvrire (le dpassement du plan salarial), on passait lenrichissement ouvrier (faisons du salaire et de nouveaux salaris volont!).

 

Il sagit dun modle qui se rfre certains points pressentis dans luvre de Marx et aux allusions propos du general intellect. Il se rsume en ceci : le dveloppement luimme du capitalisme, en labsence dune transition au communisme, a dpass sous une forme qui lui est propre le stade de la division sociale du travail qui caractrise la grande industrie. Dans ce contexte, lobjet du conflit social se dmatrialise : il sagit dsormais de dsaliner dans la lutte la communication productive, la production immatrielle. Cest alors lultime virage de loprasme dans la nouvelle perspective dintervention sur le plan des typologies du travail alternatif et moderne ou la sparation capitaliste entre le travail manuel et le travail intellectuel arrive sa fin, o lon assiste la reprise et la reconqute du travail vivant de la part des ouvriers . Cest la victoire ouvrire lՎpoque capitaliste, le contrle de la valeur dusage de la force de travail et de sa valeur dՎchange relative libre des lois mercantiles. Une nouvelle NEP, la phase o le parti bolchevik conduit en linflchissant le systme de production capitaliste en Russie.

 

Une telle analyse appelle quatre critique de fond :

 

il nexiste pas encore une vidente capacit effective des ordinateurs incorporer lintelligence humaine ;

la dduction dun rapport social comme riposte spculative a une transformation productive oublie le caractre historique/social du rapport qui sinstaure dans le travail salari, cestЈdire quil nest pas simplement une adaptation la structure technique quil trouve face lui et quil est, au contraire, un lieu dense de relations, interactions, conflits qui dotent le travail luimme de sens et en dtermine en grande partie la transformation ;

lՎmancipation des travailleurs et des proltaires en gnral nest pas le problme dun hypothtique sujet social central de laccumulation (hier cՎtait louvrier masse, aujourdhui le travailleur intellectuel) et nest pas pensable et praticable uniquement comme une redfinition du sens et du dveloppement de la vie sociale luvre dans toute la classe y compris dans les modifications de ses relations internes ;

on oublie les lois du systme de production capitaliste et sa capacit relative dexpansion et dinclusion. Ce soidisant travail libr accouche de nouvelles formes modernes de contrle et de servitude. Les rcentes bataille sur le call centers models sur lorganisation industrielle, et les formes historiques du capitalisme monopolistique, mettent fin au mythe noproductiviste moderne.

 

Il reste la marge de cette critique une autre valuation essentiellement pratique : la production de signes et de langage pourrait tre encore une portion minime de lunivers de la production de marchandises et la majeure partie du travail immatriel pourrait tre encore aujourdhui destine assurer les condition de ralisation de la plusvalue incorpore dans les marchandisesobjets.

 

 

 

Conclusion : Loprasme entre mythe et paillettes[23]

 

En conclusion, nous pouvons dire que sur quelques questions loprasme russit simposer comme reconstruction de la thorie rvolutionnaire en partant de la ralit matrielle des nouveaux comportements subversifs des proltaires occidentaux, en rompant avec la logique tiersmondiste rtrograde qui se rpandait partout cette poque et en rajeunissant sans aucun doute aussi une praxis drive de la tradition stalinienne. Mais lincapacit rompre avec celleci et assumer une position rvolutionnaire sur un trop grand nombre de points conduit cette exprience au naufrage par implosion. Les problmes lis au parti, au rle de la lutte syndicale, de lՃtat, du contenu du communisme, nont pas t analyss. Loprasme, se rattachant de manire gnrale au vieux mouvement ouvrier, a adapt quelques points la situation sociale nouvelle. Produit dune priode o le proltariat na pas manifest sa force radicale, ce mode dՐtre a concid de manire dtermin gradualisme avec lՎvolution de loprasme vers le rformisme de type socialdmocrate ; et dans quelques cas nous avons vu ses thoriciens devenir lavantgarde du systme parlementaire[24]. Quelques uns des membres de ce courant sont parvenu proposer des lments danalyse provocateurs, mme sils taient trop souvent hasardeux et non confirms par les faits, pour se dmarquer du contrle diffus exerc par le vieux mouvement ouvrier, mais, sembourbant dans des questions dj dbattues dans le mouvement rvolutionnaire lՎpoque de la rvolution[25], ils ne sont pas parvenu pour autant tre une charnire entre les courants du mouvement radical.

 

Le dsquilibre subjectiviste de loprasme a fait que lanalyse de la ralit capitaliste se rsout au transfert du moment objectif de la valeur dans le moment subjectif de la classe. Loprasme ne reprend pas lanalyse de Marx qui se meut autour de deux ples complmentaires dans un rapport dialectique continu : dun ct le capital comme puissance sociale, pure objectivit, de lautre la classe ouvrire, partie de ce rapport, mais aussi moment autonome, subjectivit antagonique. Dans ce rapport peut se lire le schma qui voit dans la rapport criservolution communiste, la ralisation de la communaut humaine. Pour critiquer loprasme, toutefois, il nest pas ncessaire de sopposer lobjectivisme faon IIme Internationale[26] : il faut surtout rinvestir le caractre dialectique du mouvement du capital.

 

Mattick[27], crivait : La connaissance thorique du fait de lՎcroulement du capitalisme cause des ses contradictions nimplique pas de soutenir que la vritable crise sera un processus automatique, indpendant des hommes. Sans les hommes, lՎconomie nexiste pas non plus. Dun point de vue marxien, il nexiste donc aucun problme purement conomique dans la mesure o la dialectique porte concevoir les processus comme totalit : lՎcroulement rel est donc concevable uniquement lorsquil est tenu compte de tous les lments du processus historique. Trs probablement, ajoute Mattick les masses auront dj fait la rvolution avant que cet croulement du capitalisme calcul conomiquement travers de nombreuses analyses abstraites puisse se rencontrer dans la ralit.

 

Pour Mattick, les luttes de classes dpendent de la situation matrielle de la classe ouvrire et pour cette raison elles ont toujours un caractre conomique. Ce nest quau dbut de cette phase, que lon pourrait qualifier de collapsus, cestЈdire quand le capital peut continuer dexister uniquement sur la base de lappauvrissement croissant du proltariat, que la lutte conomique se transformera en lutte politique, et que les masses ouvrires soient ou non conscientes de cette situation, la question du pouvoir se posera ncessairement. Laction rvolutionnaire de la classe ouvrire ne peut pas sexpliquer par des motifs autres que ceux qui naissent des ncessits matrielles de la vie, et cellesci sont strictement lies la situation conomique de la socit.

 

Le nud entre les limites du capitalisme et la rvolution ouvrire, entre dveloppement objectif et intervention objective, et par consquent la signification politique de l analyse conomique abstraite est explique par Mattick dans des termes qui respectent fidlement la conception expose par Grossmann[28] dans une lettre du 2 octobre 1934 qui lui tait adress : En tant que marxiste dialectique je sais videmment que les deux cts du processus ; les lments objectifs t ceux subjectifs sinfluencent rciproquement. Les facteurs se fondent dans la lutte de classes (). Mais lissue de lanalyse nous devons appliquer le processus dabstraction qui consiste isoler les lments singuliers, pour mettre en lumire les fonctions essentielles de chacun deux. Lnine parle souvent de la situation rvolutionnaire qui doit objectivement tre donne comme prsuppos de lintervention victorieuse active du proltariat. Ma thorie de lՎcroulement ne vise pas lexclusion de cette intervention active, elle se propose plutt de montrer dans quelles conditions une telle situation rvolutionnaire donne objectivement peut surgir et surgit.

 

 

 

 

 



[1] Le titre gnral et les intertitres sont du traducteur.

[2] Fdration des Employs et des Ouvriers Mtallurgistes, membre de la CGIL (N.d.T.).

[3] Ces groupes ns pour la plupart dans la diaspora trotskiste, rfutaient la dfinition de lURSS comme tat ouvrier dgnr, donne par Trotsky luimme. Ils dvelopperont leur propre analyse de lURSS et rompront sinon sur tout, au moins avec le schma lniniste du parti, par rapport la disjonction entre luttes conomiques et luttes politiques, et donneront vie ce que nous pouvons dfinir comme une gauche autonome antibureaucratique. En Italie il y aura un petit groupe qui reprendra cette interprtation et qui se posera en interlocuteur international de cette exprience : Unit Proletaria de Cremone, dans lequel militait Danilo Montaldi. Par commodit nous appelons ces groupes oprastes hors Italie , mais cela est ambigu dans la mesure ou dun point de vue politique ils taient trs loigns du courant italien.

[4] Pour plus de dtails sur les interprtations de lURSS voir  B. Bongiovanni Lantistalisimo di sinistra e la natura sociale dellURSS (Feltrinelli). Plus rcemment sur le mme sujet : Da Stalin a Gorbacev, classi sociali e Stato nella Russia sovietica, de G. Tacchi, d. Graphos, qui complte le texte de Bongiovanni et place le dbat sur la Russie dans sa porte historique.

[5] Sur lusage capitaliste des machines dans le nocapitalisme.N.d.T.

[6] Plusvalue et planification, notes de lecture sur le Capital. N.d.T.

[7] Je retraduit de litalien ce passage des Grundrisse dans la mesure o il est sensiblement diffrent de la traduction de Dangeville qui dit : Tout dabord : le capital contraint louvrier travailler audel du travail ncessaire. Cest la seule manire pour lui de se valoriser et de produire une plusvalue. Mais, par ailleurs, il nutilise le travail ncessaire que dans la mesure o il crera du surtravail et o celui-ci pourra se raliser sous forme de plusvalue. Il pose donc le surtravail comme condition au travail ncessaire : la plusvalue est la limite du travail matrialis et de la valeur en gnral.

Le capital ne pose donc le travail ncessaire que sil peut crer une plusvalue, car sur la base d la production capitaliste, il ny a pas de travail ncessaire indpendamment de la plusvalue. Cette limitation que les Anglais appellent une barrire artificielle au travail  et la cration de valeur dcoule donc directement du fait que le capital cre du surtravail et de la plusvalue.

De part sa nature mme, le capital pose donc des entraves au travail et la cration de valeurs, ce qui est e contradiction avec sa tendance les accrotre sans limites. Le capital est ainsi une contradiction vivante : il impose aux forces productives une limite spcifique, tout en les poussant dpasser toute limite. (Fondements, t. I, d. Anthropos, Paris 1967, p. 379. N.d.T.)

[8] Il en va de mme pour ce passage qui, dans la traduction franaise, est plac comme une note de Marx : tant donn que la valeur constitue la base du capital et nexiste donc quau travers de lՎchange contre une autre valeur, le capital ne peut procder quen un mouvement constant dautorpulsion. Il est donc absurde de concevoir la possibilit dun capital universel nayant pas en face de lui dautres capitaux avec lesquels il procde des changes : or, au point o nous en sommes, il a seulement en face de lui le travail salari, ou luimme. La rpulsion quexercent les capitaux les uns sur les autres se constate dj dans le fait quils sont obligs de raliser leur valeur dՎchange. (op. cit., p. 379. N.d.T.).

[9] Rappelons que Marx est linitiateur de lenqute ouvrire mene en France en 1880 dont il a luimme rdig le questionnaire, en sinspirant des enqutes menes en dans les fabriques anglaises lorigine desquelles il voit la limitation de la journe lgale de travail 10 heures, la loi sur le travail des femmes et des enfants, etc. Lenqute, tire 2500 exemplaires et envoye plusieurs exemplaires toutes les socits ouvrires, tous les groupes ou cercles socialistes et dmocratiques, tous les journaux franais Les attendus de la dmarche de Marx sont les suivants : Nous esprons dՐtre soutenus, dans notre uvre, par tous les ouvriers des villes et des campagnes, qui comprennent queux seuls peuvent dcrire en toute connaissance de cause les maux quils endurent, queux seuls, et non des sauveurs providentiels, peuvent appliquer nergiquement les remdes aux misres sociales dont ils souffrent, nous comptons aussi sur les socialistes de toutes les coles qui, voulant une rforme socialiste, doivent vouloir une connaissance exacte et positive des conditions dans lesquelles travaille et se meut la classe ouvrire, la classe qui lavenir appartient. Marx, uvres t. I, d. Gallimard, Paris 1965, p. 1528 (N.d.T.).

[10] Cest le texte le plus radical de Socialisme ou Barbarie, traduit et publi deux reprises par Collegamenti Wobbly.

[11] Danilo Montaldi, influenc par cet auteur et ce courant crivait propos de la publication de Louvrier amricain de P. Romani : Louvrier est avant tout un tre qui vie dans la production et lusine capitaliste avant dՐtre ladhrent dun parti, un militant de la rvolution ou le sujet dun futur pouvoir socialiste ; et cest dans la production que se forme aussi bien sa rvolte contre lexploitation que sa capacit construire un type suprieur de socit () pour cette raison nous invitons les camarades, les ouvriers, les lecteurs, crire Battaglia Communista (*) en comparant leur propre situation avec celle de louvrier amricain, ce qui revient dire avec louvrier de tous les pays, avec louvrier tel quil est ici et maintenant, l o on le peroit dans son identit, l o on le voit dans sa diversit. A contrario, G. Munis rpondait travers le Fromento Obrero Rivoluzionario (FOR) qui, bien quappartenant au mme courant que Socialisme ou barbarie niait limportance donne la sociologie en posant immdiatement le problme de la rupture entre le Capital et le travail en termes immdiats et radicaux : son tour, la tendance Socialisme ou barbarie, originaire galement de la IVme Internationale apprivoise, sest laisse prendre en remorque par la gauche franaise dliquescente pour tous les problmes et dans les moments les plus importants : la guerre dAlgrie et le problme colonial, le 13 mai 1958 et le pouvoir gaulliste, les syndicats et les luttes ouvrires actuelles, lattitude par rapport au stalinisme et au dirigisme en gnral, etc. Ainsi, bien que reconnaissant dans lՎconomie Russe un capitalisme dՃtat, elle a seulement contribue brouiller les esprits. Renonant lutter contrecourant et prfrant ne rien dire la classe ouvrire quelle ne puisse entendre, elle sest voue toute seule la faillite. Prive de nerf cette tendance est tombe dans une versatilit qui frle la balourdise existentialiste. Rappelons propos de celleci et des autres tendances existant aux USA les mots de Lnine : Seul un intellectuel la peine pense quil est suffisant de parler aux ouvriers de la vie dusine en les ennuyant avec ce quils savent depuis longtemps. (*) Battaglia Communista est la dsignation usuelle du groupe italien Partito Comunista Internazionalista (PCInt) par le nom de son journal. Toujours actif de nos jours, il a t fond entre 1943 et 1945. Suite la scission qui se produit en 1952, le PCint prcise ses positions et prend une certaine distance par rapport aux thses originelles de la gauche italienne, rejetant les luttes de libration nationale et adoptant une conception moins lniniste du parti (N.d.T.).

[12] De la Piazza Statuto Turin, les 7, 8, et 9 juillet 1962 (N.d.T.).

[13] LOrdine nuovo est le titre du journal dirig par Gramsci partir de mai 1919. loccasion du mouvement doccupation dusine Turin en 1920, Bordiga soppose dans Il Soviet aux ordinovistes en ces termes On a excessivement surestim Turin le problme du contrle, en le concevant comme une conqute directe que le proltariat, grce au nouveau type dorganisation par entreprise [du parti : la sovietisation impose par Moscou que rejetait Bordiga], peut arracher la classe industrielle, en ralisant ainsi un postulat conomique communiste, ralisant une tape rvolutionnaire avant mme la conqute politique du pouvoir, dont le parti est lorgane spcifique. (Mars 1920). Cit in J. Camatte, Bordiga et la passion du communisme, d. Spartacus, octobre 1974, p. 207. L ordre nouveau dont il est question dsigne le proltariat, l ordre des proltaires au sens prcapitaliste et ne renvoie pas un ordre social en gnral (N.d.T.).

[14] Unione Italiana del Lavoro ( rformiste ). Rappelons rapidement les faits. Une fois expirs les contrats de travail du secteur automoteur, lentreprise se trouva au centre dun grave conflit du travail qui dboucha sur les violents affrontements de la Piazza Statuto (7, 8 et 9 juillet 1962), Turin. Accuss davoir sign des contrats-poubelles, les syndicats officiels furent ignors par des dizaines de milliers douvriers en grve qui dclenchrent une vritable rvolte urbaine. La police ne pt reprendre la Piazza Statuto quaprs trois jours daffrontements et aprs avoir reu des renforts en provenance dautres villes. Les protagonistes des vnements, une fois de plus, taient de jeunes mridionaux. Le PCI prit immdiatement position en dnonant les insurgs comme des provocateurs fascistes ..

[15] Lnine en Angleterre (N.d.T.)

[16] La similitude de ce schma avec celui de G. Sorel est notable, qui rfute le matrialisme et la conception des classes comme entits adialectiquement spares.

[17] Vieille tactique pour une nouvelle stratgie. N.d.T.

[18] Laugmentation des salaires a largement dpass laugmentation de la productivit. Cest--dire que la productivit du travail na pas diminu en valeur absolue ; mais la masse salariale a cr en valeur relative. Les revenus du travail ont augment plus rapidement que les revenus du capital. Cela a eu deux consquences fondamentales : une inflation par les cots, et avant tout celui de la force de travail ; et une contraction relative des profits par rapport aux salaires (...) Le revenu du travail sest trouv redistribu en partie, le profit attaqu, les marges dautofinancement des grandes entreprises entames et les investissements directs sont demeurs bloqus. Et tout cela tandis que les cots de production sՎlevaient et que le rendement du travail baissait du fait de la permanence des luttes ouvrires, de la mobilit excessive de la force de travail et de labsence de sauts technologiques. (Ouvriers et capital, d. Bourgeois, Paris 1977, p. 114115). Et avant cela : Dans ces conditions la classe ouvrire doit sorganiser consciemment comme lՎlment irrationnel au sein de la rationalit spcifique de la production capitaliste. Il faut que la rationalit croissante du capitalisme moderne trouve sa limite insurmontable dans lirrationalit croissante des ouvriers organiss, cest--dire dans leur refus dune intgration politique lintrieur du dveloppement conomique du systme. De sorte que la classe ouvrire devient la seule anarchie que le capitalisme ne parvient pas organiser socialement. (Ibid. p. 96). N.d.T.

[19] La rvolution contre le Capital. N.D.T.

[20] Tronti va beaucoup plus loin que a dans ce postcriptum dans la mesure o il remet en question le caractre absolu de la contradiction entre la classe proltaire et le capital du point de vue de la soidisant exploitation . Labsence des grandes luttes de 1922 1933 est due deux motifs diffrents dans deux priodes diffrentes : de 1922 1929 et de 1929 1933. Au cours de la premire priode, les marges objectives du profit capitaliste dbordent sur le terrain occup par les ouvriers. Durant la seconde, il nexiste plus de marges pour aucun des deux partis ; une participation du salaire ouvrier au profit du capital est impensable, les frontires entre les classes vont mme jusquՈ seffacer, il ny a quune seule crise pour tout le monde. Pourquoi lutter quand on ne peut le faire pour arracher des concessions ladversaire ? Pour prendre le pouvoir ? Ne commettons jamais de confusion. La classe ouvrire nest pas le parti bolchvique russe. Tenons-nous en au fait. (op. cit., p. 351).  Le mot dordre : organisons les inorganiss, allait aussi bien au capital moderne quau nouveau syndicat. Il existe des moments daffinits lectives entre les deux protagonistes de classe de lhistoire moderne, o lun comme lautre, et chacun dans son camp, se retrouvent en tat de division interne, et doivent rsoudre au mme moment des problmes de comportements stratgiques et de restructuration de leurs organisations. Alors on voit la partie la plus avance du capital tendre la main la partie la plus avance de la classe ouvrire et, la diffrence de ce que lon serait sectairement en droit dattendre, la classe ouvrire ne repousse pas le baiser, ne refuse pas limmonde union, mais au contraire lexploite allgrement pour gagner quelque chose. (op. cit., p. 364). En 1920, loccasion du mouvement doccupation dusines en Italie, G. Ollivetti, Secrtaire gnral de la Confindustria lanait : lavenir appartient aux classes organises (cit in P. Spriano, Loccupation des Usines. Italie Septembre 1920, d. La pens sauvage, Paris 1978 (1964 en Italie), p.33). N.d.T.

[21] La cassa integrazione est une institution propre au rgime social italien qui rmunre le chmage technique (N.d.T.)

[22] En franais dans le texte (N.d.T.).

[23] Cest le titre de larticle en Italien (N.d.T.).

[24] Il faudrait consacrer une analyse particulire aux dterminations de la praxis et au rle quils ont tenus par rapport la lutte arme, en jouant avec le feu, en cherchant retourner en leur faveur une situation qui ne leur appartenait pas, en produisant seulement de la dissociation   et en permettant une augmentation de la rpression.

[25] LՎpoque des rvolutions o le proltariat a dmontr sa force au niveau mondial concide avec la fin de la premire guerre mondiale. Beaucoup des questions poses cette poque tombent immdiatement alors, sans avoir t toutefois rsolues ou affrontes de la mme manire. Montaldi sexprime ainsi ce propos : Je ne voudrai pas donner limpression dՐtre moi aussi victime de lesprit malin de lamalgame : quand je fait allusion aux problmes plus ou moins communs entre ces groupes ou tendances des annes 30 et les ntres (). Certes, ces problmes ne se sont pas prsents nous dans la mme forme sous laquelle ont d les rsoudre, ou cherch les rsoudre, Trotsky, Bordiga, Korch et puis Leonetti (*) etc., mais cest depuis cette poque que lon dbat partir des mmes arguments. Si lon se penche sur certains compterendus du dbat en cours entre les groupes communistes de gauche de ces annes, la concidence avec le dbat actuel entre le spontanisme et les dfenseurs de la thorie du parti est vident comme le nez au milieu de la figure. (*) Alfonso Leonetti (1895-1984). Dit aussi Torino, Feroci. Dirigeant historique du P.C. Italien, compagnon de Gramsci, il fait partie des trois exclus du Bureau Politique du P.C.I. qui forment la "Nouvelle Opposition Italienne". Membre de la direction de l'Opposition de Gauche Internationale jusqu'en 1936, il craque alors et entame un processus de capitulation qui aboutit sa rintgration dans le P.C.I. aprs 1945. On retrouvera aprs sa mort un "Testament" expliquant qu'il n'avait jamais cess de considrer comme juste la politique de la IV Internationale. (N.d.T.).

[26] La Seconde internationale, dans sa composante majoritaire, voyait le dveloppement du capitalisme dune manire strictement positivistedterministe en niant dans lՎvolution de la lutte de classe lapprofondissement des contradictions, et en posant comme paradigme laffaiblissement des contrastes de classe et un dveloppement du socialisme, en fonction du dveloppement des forces productives.

[27] N en 1904 dans une famille ouvrire de Berlin (son pre fut membre de la ligue Spartacus), il participe aux vnements rvolutionnaires de l'poque dans les rangs du KAPD, organisation communiste de conseils. Il restera l'un des reprsentants thoriques de ce courant aprs son installation aux Etats Unis (1926) o, toujours outilleur, il militera notamment aux IWW syndicalistes rvolutionnaires. De 1934 1943, Mattick animera les publications des communistes de conseils amricains (voir le recueil La Contre Rvolution bureaucratique, d. 10/18). Par la suite, il s'attachera plus particulirement la critique de l'conomie politique: Marx et Keynes (Gallimard, 1972), Crises et Thories des crises (Champ libre, 1976). (N.d.T.)

[28] H. Grossmann (Cracovie 1881 Leipzig 1950) est lauteur de La loi de laccumulation et de leffondrement du systme capitaliste. Publi en 199, au moment de lՎclatement de la crise mondiale, il permit de remettre au premier plan la thorie marxienne de laccumulation alors tombe dans loublie. Son seul livre publi en Franais est Marx, lՎconomie politique classique et le problme de la dynamique, avec une prface de P. Mattick, d. Champ libre, Paris 1975